De quelques fantasmes de la littérature combinatoire
La publication des textes en ligne a changé nos habitudes de lecture et d'écriture, il est devenu banal de le constater. Cependant toutes les conséquences de ce bouleversement n'ont pas encore été tirées. Jusqu'à présent l'attention des chercheurs s'est surtout portée sur les nouvelles conditions de production, de diffusion et de réception du texte. De ce point de vue, l'informatique a surtout été considérée comme nouveau support, venant après le livre et remplaçant le papier, ouvrant une nouvelle ère après celle de l'imprimerie, offrant un nouveau vecteur de communication à l'œuvre écrite et instaurant de nouvelles relations entre les auteurs et les lecteurs.
Or avant d'être perçu comme un nouveau support de l'écrit, rapidement banalisé grâce au succès du traitement de textes, l'ordinateur a d'abord été utilisé par une poignée d'écrivains et de créateurs pour ce qu'il était à ses débuts - il n'était alors que cela - : une machine à calculer d'une puissance jusqu'alors inconcevable, capable de combiner non seulement des nombres, mais aussi, très tôt, des lettres, des mots et des phrases. Cette puissance de la machine a d'autant mieux exercé sa fascination qu'elle semblait offrir un outil capable de renforcer quelques fantasmes qui ont travaillé l'histoire de l'écriture depuis ses commencements et de leur ouvrir de nouvelles potentialités. Ce sont quelques-uns de ces fantasmes que je me propose d'examiner ici.
(Source: Author's introduction)